De la géographie du Moyen-Age
Le Moyen-Age européen ne cherche pas à parcourir le globe terrestre. Le monde connu des grecs anciens est tenu comme étant les seuls espaces à parcourir. Alexandre le Grand a vu le grand océan oriental (l'océan indien) qui, avec l'océan atlantique à l'ouest, marque la fin du monde.
Car la géographie Aristotienne, reprise et complétée par celles de Strabon, Pausanias et Hérodote, demeurent les seuls textes de référence. Les moines continuent à copier ces écrits pendant tout le Moyen-Age et l'église Catholique soutient que seuls ces récits sont digne de foi en la matière.
Selon eux, le monde est un disque plat, délimité à l'ouest et à l'est par la masse des eaux (océan atlantique, océan indien), dont la taille est trop importante pour pouvoir être franchis pour les navires de l'époque. Plus l'on s'avance vers le nord, plus le climat devient froid et passé une certaine latitude, la vie devient impossible et les navires se prennent dans un océan de glaces. Au sud, c'est l'inverse : il y fait de plus en plus chaud à l'équateur et les navires risquent de s'embraser à mesure qu'ils s'approchent du soleil, il n'y a plus que le désert de sable et de pierre.
Une longue tradition enseigne que le Paradis perdu est encore sur terre. Flavius Josèphe dès le 1er siècle de notre ère soutient que le Nil vient du Jardin d'Eden, devenu inaccessible depuis le péché originel. Isidore de Séville affirme que "le paradis est un lieu d'Orient" dont on sait que proviennent des mets délicieux : les épices.
Pour certains le Paradis est placé à l'extrémité et aux confins du monde là où naissent le Gange, le Tigre, l'Euphrate et le Nil, réputés être les quatres fleuves dont parlent la Génèse. Selon la géographie monothéiste, Jérusalem occupe le centre de l'univers, selon l'Ecriture qui dit : "C'est Jérusalem que j'ai placé au milieu des nations, environnée de pays étrangers".
Au XIIème siècle Pierre Lombard situe aussi le paradis en orient et le voit "séparé par un large espace de terre ou de mer des régions qu'habitent les hommes". Thomas d'Aquin place aussi le paradis en Orient et le voit "coupé de notre habitat par certains obstacles, soit de montagnes, soit de mer, soit de quelques région brûlante qui ne peut être traversée."
Plusieurs mappemondes du XIIème et XIIIème siècles placent Adam et Eve goûtant le fruit défendu dans une île circulaire entourées d'un mur. Le jardin d' Eden est clos mais continue à entretenir en eau l'univers après un parcours souterrain et ses eaux charrient de précieuses épices et aromates.
A la fin du XVème siècle, lorsque les Portugais et les Espagnols s'aventurent sur l'Atlantique pour découvrir un nouveau passage vers l'Asie, bien que l'on commence à penser que le monde puisse être un cylindre et non un disque plat, cette géographie est toujours en vigueur. Il est donc logique pour le pape de diviser le monde en deux : l'est pour les Portugais, l'ouest pour les Espagnols.
Lorsqu'un navigateur Portugais, Lopo Gonçalves, franchit l'équateur en 1473, c'est un véritable exploit : son navire ne s'est pas embrasé. Mais cet exploit vient à nouveau fragiliser la parole de la papauté, qui affirmait jusque là, en se référent aux textes antiques, que cela n'était pas possible. Dans une Europe où la Réforme commence à faire entendre sa voix, c'est tout un monde qui commence à vaciller sur ses fondations...